Plaidoyer pour le lien

Candidature pour une conférence sur le lien
« Les liaisons vertueuses en contexte professionnel : du réseau aux liens ! » : sur cette idée de « liens » plutôt que de « réseaux professionnels » j'ai proposé un atelier sous forme de témoignage de mon expérience, illustré d'exemples, nourri par des théories sur le réseau et invitant à la pratique collective. En quoi la création de liens est-elle précieuse pour son parcours professionnel ? Comment faire vivre et développer son maillage ? Cet atelier a été donné des centaines de fois à plus de 1 000 personnes dans des écoles, des incubateurs, des associations d'entrepreneurs, des associations de retour à l'emploi, des organismes de formation, des centres qui accompagnent des personnes dans leur transition de vie. Ce plaidoyer sur le lien a été retenu par ailleurs lors du festival « AIRT DE FAMILLE » à Lyon en 2024, pour une scène ouverte « T'es show ». En voici le résumé.

Ma passion ? Créer des liens

C'est ce que j'aimerais partager en 3 minutes ! Pour rentrer dans le sujet, que vous évoque le lien ? Une définition serait : ensemble des relations, rapports et des liens existants entre des personnes qui se rencontrent, se fréquentent et communiquent entre elles (lien d'interdépendance, d'interaction, d'analogie).

Jacques Salomé a eu l'idée originale de matérialiser cet espace invisible appelé lien, qui à la fois relie et sépare deux êtres. Il a inventé le terme d'« écharpe relationnelle ». L'écharpe peut être revêtir plusieurs aspects : colorée, douce, souple, tendue… « L'écharpe symbolisant la relation entre deux personnes est un outil pédagogique d'une singulière efficience. Chaque fois que je me sens en difficulté de relation, je peux imaginer une écharpe entre l'autre et moi. Cette écharpe me relie (sans m'attacher ou m'étrangler), je peux différencier ce qui vient de l'autre et ce qui vient de moi. Je peux tenter de le recevoir, de l'amplifier ou de le rejeter. Je peux mieux reconnaître comment est perçu par l'autre ce qui vient de moi. » (Jacques Salomé, « T'es toi quand tu parles », 1991)

Le constat ? Nous traversons une crise du lien. Il y aurait de multiples manières de l'illustrer. Voici celles qui me touchent :

  • Dans les organisations : qui a vécu un burn out ? ou qui connait quelqu'un qui en traverse un ? Oui, nous assistons à l'explosion du nombre de burn out au travail (34% des salariés français seraient en burn out, dont 13% en burn out qualifié de « sévère », soit plus de 2,5 millions de personnes (source ORSE).
  • Dans les familles : qui pense qu'un de ses ainés souffre de solitude ? D'après une étude de l'INSEE publiée en 2021, environ 1,5 million de personnes âgées de 75 ans et plus en France souffrent d'isolement social sévère ou modéré, soit la population du Grand Lyon.
  • Individuellement : nous passons plus de 3 heures par jour sur notre téléphone dans l'illusion du lien. Nous scrollons, tenez-vous bien, la hauteur médiane à Lyon entre les tours Crayon et Incity, soit 180 m !

Et pourtant ! Et pourtant… Si je vous demande de fermer les yeux et de penser à ce qui compte dans votre vie? Dans cet ouvrage « Ces liens qui nous font vivre, éloge de l'interdépendance » de Rebecca Shankland (professeur de psychologie à Lyon 2), préfacé par Christophe André, les études sont unanimes. « Plusieurs enquêtes ont montré qu'à la question : « Qu'est-ce qui vous rend heureux et donne du sens à votre vie ? », la réponse la plus fréquente était : « La relation aux autres » (familles et amis en priorité ». Eh oui, le lien c'est la vie. On lit même, page 66 : « Une étude a montré que les personnes ayant peu de relations sociales avaient trois fois plus de risque de décéder que les autres toutes choses étant égales par ailleurs. »

Le paradoxe de la rencontre

Chacun craint la situation de se retrouver seul, mais en même temps tout le monde est capable de créer des liens, dans un cadre. Essayons ! Je vous laisse 30 secondes, pour vous tourner vers un voisin que vous ne connaissez pas et vous chercher deux points communs ? Vous avez vu ? C'est très facile de trouver des points communs avec un inconnu, sous contrainte ! Et pourtant paradoxalement, lorsqu'on enlève la contrainte c'est plus difficile. Vous avez probablement tous connu des moments où on se retrouve dans une soirée sans connaître personne et avec le sentiment de ne pas savoir créer le lien et de se dire : « Mais qu'est-ce que je fais là ! » Et là, c'est la « gênance » (sentiment de gêne, de malaise éprouvé dans une situation embarrassante, Petit Robert 2023). On peut face à la gênance, pour se donner une contenance, être tenté de dégainer son téléphone… et scroller, scroller vers la tour Crayon et l'au-delà.

Revisitons les basiques pour faire face à cette situation !

  • Rendre service. Vous aimez rendre service ? Eh bien dites-vous que vous rendez service à l'autre… qui vit probablement la même gênance que vous, qui sera soulagé que vous fassiez le premier pas. Rendez-lui service !
  • Se présenter. J'ai remarqué aussi que parfois il suffisait de dire son prénom, sourire… et de laisser un silence. L'interlocuteur enchaînera !
  • Se préparer. Préparer des phrases pour entrer en lien. Souvent la question que je pose machinalement, est : « Qu'est-ce que tu fais dans la vie ? ». Mais c'est dommage, nous ne sommes pas notre travail ! Plus intéressant serait : « Comment tu fais ton travail ? » ou mieux « Qu'est-ce que tu fais dans la vie ? », « qu'est-ce que tu aimes dans la vie ? ». Je vais partager une phrase que j'ai entendue : « Si vous n'étiez pas là ce soir, vous seriez où ? ». Cette phrase permet d'ouvrir des conversations.

Devenir des ambassadeurs du lien

Alors, mon propos est que chacun ce soir en repartant dans la file fasse l'expérience de demander son prénom à l'inconnu avec qui il a fait l'exercice (voir d'échanger son contact sur LinkedIn).

Et puis, que demain par exemple, si vous pensez à une personne que vous aimez vous l'appeliez pour prendre des nouvelles. Oui, sans attendre d'avoir quelque chose à lui demander…

Et qu'après demain, si vous prenez le tram, vous stoppiez votre scroll et vous testiez de parler à votre voisin. « Bonjour, je m'appelle xxx, on m'a suggéré de faire l'expérience de discuter dans le tram, êtes-vous partants pour essayer ?»

Et qu'après après demain, vous demandiez à la caissière si elle a passé une bonne journée. Et qu'après après après demain, vous demandiez à quelqu'un : « Comment je peux t'aider» ?

Je vous propose de devenir un ambassadeur du lien, conscient de l'humanité que vous portez en vous, conscient de votre sourire et de votre potentiel de rencontre pour œuvrer à un monde plus doux !

Je finirai par cette phrase d'un chercheur et philosophe lyonnais, Albert Jacquard (rien à voir avec les métiers à tisser, même si…) qui a déclaré : « Ce que je suis, ce sont les liens que je tisse avec les autres.»

Relions-nous les uns les autres.

En ressources ? J'ai contribué à l'idée de la Fresque du lien : la Fresque de la Rencontre. Je m'intéresse aux Maisons de la Conversation, à la Fédération Française pour les Liens Sociaux et au podcast de Lily Gros sur L'aventure du lien.

Et je vous invite à découvrir notre bibliographie : les livres en lien avec le lien et la rencontre

Peut-être postulerons-nous à un TED ?

Julie de Reliez-vous

Thème « Autour du lien »

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